
Réf : GEOC101
Ce dossier est destiné à compléter celui, consacré à l’Essor de la Géologie française, que Géochronique a publié en décembre 2003, dans son n°88. Celui-ci porte sur le XXe siècle qui a été principalement marqué par la révolution scientifique qu’a constitué, au cours des années 60, l’émergence de la théorie de “l’expansion des fonds océaniques”, couronnée peu après par celle de la “tectonique des plaques”. Comme chacun sait, cette révolution, qui a fondamentalement rénové notre conception de l’histoire et de la structure de notre planète, a été rendue possible par la mise en oeuvre de techniques nouvelles issues des sciences physico-chimiques.
Pour la première fois, une théorie de la Terre, à laquelle adhère aujourd’hui la quasi-totalité des géologues, fut ainsi proposée avec succès. Elle avait certes été précédée, un demi-siècle plus tôt par la théorie de la “dérive des continents”, proposée par Alfred Wegener qui, faute d’en donner une explication crédible, ne convainquit qu’une faible minorité de géologues.
L’introduction des méthodes physico-chimiques dans l’étude de la Terre eut pour effet de produire, au cours de la seconde moitié du siècle, une mutation profonde dans la manière de pratiquer la géologie. L’utilisation d’équipements lourds modifia en effet radicalement la façon d’étudier notre planète. Là où, précédemment, la recherche était une activité individuelle, conduite le plus souvent dans le cadre d’un laboratoire universitaire, un changement d’échelle se révéla indispensable pour financer l’acquisition des appareillages nécessaires et pour fédérer les équipes de recherche. C’est alors que l’intervention du CNRS se révéla décisive à travers une stratégie de programmes fondés sur la réalisation d’objectifs communs. C’est ainsi que naquirent en 1963 les Recherches coopératives sur Programme (RCP), puis, en 1966, les Laboratoires associés (LA), destinés à soutenir des laboratoires universitaires auxquels un label d’excellence était ainsi accordé. À titre d’exemples, bénéficièrent alors de cette reconnaissance le laboratoire de géochronologie que dirigeait Maurice Roques (1911-1997) à Clermont-Ferrand et le centre de recherches géodynamiques de Louis Glangeaud (1903-1986) à Paris. Tous deux contribuèrent alors à la modernisation de la recherche. En 1971, furent ensuite créées les Actions thématiques programmées (ATP). Avec la fondation en 1967 d’un Institut national pour l’Astronomie et la Géophysique (INAG), la géophysique se trouva bientôt placée au centre des priorités du CNRS. Cela permit aux géophysiciens français de lancer un important programme pluridisciplinaire de recherches sur l’Himalaya et le Tibet et d’entreprendre l’Étude continentale et océanique par Réflexion et Réfraction sismiques (ECORS). Ultérieurement, en 1985, la mutation de l’INAG en un Institut national des Sciences de l’Univers (INSU) dont la compétence englobe l’ensemble des sciences de la Terre, assura à la géophysique une position prééminente au sein de celles-ci. Ainsi, en un quart de siècle, s’est produit un profond changement de la façon de concevoir les recherches géologiques. Il entraîna l’éclatement d’une science quelque peu hétérogène connue sous le nom de “géologie” en un agrégat de disciplines auquel on appliqua tout d’abord la dénomination de “sciences de la Terre”, puis celle de “géosciences”
Les quelques pages que Géochronique consacre à ce sujet sont loin de rendre compte de toutes les évolutions des sciences de la Terre au cours d’un siècle fécond en découvertes. On remarquera notamment que l’oeuvre considérable réalisée hors de France par les géologues français a été totalement passée sous silence.
J. GAUDANT